Voici la première partie d'un voyage de plusieurs heures de cours et de préparation.
Cigku Hakim, notre maître de Malaisie, nous avait fait découvrir, il y a quelques temps de cela, un Jurus Kipas (enchainement codifié de techniques à l'éventail) et quelques Applikasi (applications). J'ai conservé ce jurus dans un coin de mon arsenal, le travaillant occasionnellement seul ou avec mes élèves.
Même si il y a des discussions sur l'aspect traditionnel de l'éventail (est-ce une arme historique du peuple Malais?) il fait partie de ces armes issues des influences importantes de l'archipel, carrefour culturel et économique et qui ont été adoptées et développées au moins localement. Il est évidemment présent dans les styles japonais et chinois. Le couteau papillon (balisong) s'en inspire aussi pour se dissimuler dans sa forme.
Cet été, je me suis penché davantage sur cette arme, pour en faire un cycle assez complet et riche.
Car l'éventail a beaucoup d'attraits :
- Il permet des frappes diverses, en taille (slash) avec le côté de l'éventail fermé pour plus de solidité, d'estoc avec la pointe (là aussi fermé), avec le punyo (terme de kali désignant le bout arrière du bâton et qui dépasse du poing), et enfin éventail ouvert ou en ouverture plus rarement car moins efficace (moins douloureux) pour frapper ou masquer.
- Son coefficient de déformation est faible ce qui en fait un point de force dans les clés et permet aussi des percussions tout à fait douloureuses et efficaces.
- Sa solidité en fait un outil très utile pour parer les mains nues ou équipées d'"outils" (couteau, bâton) d'un adversaire.
- Il est court et peut donc être caché, utilisé dans un espace restreint et les techniques sont rapides.
- Il est esthétique et son claquement à l'ouverture attire l'attention.
- Son port est légal (mais il deviendra une "arme par destination" si il est utilisé pour sa défense personnelle et si vous l'emportez avec vous dans le but de vous en servir la préméditation pourrait être retenue contre vous). Disclaimer : comme toujours je n'encourage aucunement le port d'arme quelle qu'elle soit, le cadre législatif en France est très strict, parlez-en avec vos instructeurs. Notre pratique martiale dépasse souvent le cadre légal. Je n'envisage ce travail que dans le cadre d'une étude martiale au sein du Gelanggang (club), comme je le fais pour le travail au couteau, machette, kerambit...
Il a évidemment quelques défauts :
- Si il est métallique, il est lourd et assez épais, en plastique il est parfait pour le travail technique sans opposition mais fragile...
- Une fois le tissu décollé des lames, il devient inutilisable et presque impossible à réparer (c'est pour cela que nous avons utilisé des bâtons courts lors des techniques avec opposition)
- Il faut prévoir quelques éventails pour les gauchers car son ouverture peut devenir un peu complexe.
- Pour devenir une arme létale il nécessite de viser des endroits fragiles ou sensibles du corps humain (il ne faut pas rêver même avec des lames d'acier acérées venir faire des entailles profondes) c'est donc un outil parfait pour entrer dans le domaine des "points vitaux" ou des endroits où ça fait mal (je ne suis pas un expert de Vessie 6 ou Coeur 14, feu ou bois, Yin et Yang, jour pair ou impair...)
Apprentissage du Jurus Kipas par Marion et Léa.
